Interlude - 1

Publié le par Arkeane

"Personne ne sort de cette maison vivant. Elle est hantée !"

Il fuyait… Courant aussi rapidement que ses jambes le lui permettaient, jusqu'à en perdre haleine. Sa vie était en jeu, il en avait bien conscience...

Derrière lui ses poursuivants le talonnaient. Trois grands gaillards armés de barres de fer. Il n’aurait peut-être pas du empiéter sur leur territoire en dealant sans leur permission, pensa-t-il naïvement tout en zigzaguant entre les arbres qui se dressaient devant lui. Il avait depuis longtemps quitté la ville et ses trottoirs trop exposés pour s’enfoncer dans la forêt afin d’essayer d’y semer ses agresseurs, mais c’était peine perdue lui sembla-il. A bout de souffle, il était sur le point d’abandonner la lutte.

Mourir pour une simple histoire de drogue et de territoire n’était-ce pas injuste ? Apres tout ce que la vie lui avait fait subir voilà qu’elle lui réservait une nouvelle épreuve dont il n’était pas sûr, cette fois ci, d’en ressortir vivant…

- Revient sale mioche ! hurla l’un des trois hommes.

Comme s’il allait obéir…

Il n’avait jamais voulu s’embarquer dans de tels ennuis, il avait juste besoin d’un peu d’argent pour pouvoir manger, et se lancer dans la vente de drogue lui avait paru être la méthode la plus rapide et la plus efficace. Sauf qu’à présent il regrettait amèrement de ne pas s’être un peu plus renseigné sur les quartiers déjà occupés par de vrais trafiquants…

Qu’il était pitoyable ! songea-t-il. Comment avait-il bien pu réussir à vivre jusqu'à aujourd’hui ? Depuis que son beau-père l’avait chassé de chez lui, après la mort tragique et brutale de sa mère et de sa petite sœur dans un accident de voiture, il avait erré sans but de squat en squat, trouvant de l’argent et de la nourriture comme il le pouvait. Cela faisait maintenant 6 mois que cette situation durait. Il était faible et amaigri, et il se rendit compte que ses jambes, tiraillées par l’effort, ne le soutiendraient plus longtemps… C’est alors qu’il vit se dresser devant lui une enceinte surmontée de pics. Dans un ultime effort il l’escalada tant bien que mal et retomba lourdement de l’autre côté. Allongé dans l’herbe, respirant avec de grandes difficultés, il s’incita à reprendre sa fuite désespérée mais son corps ne lui répondait plus. Il s’attendait à ce que les trois hommes lui tombent dessus d’une seconde à l’autre, et alors s’en serait fini de lui… Mais rien ne se produisit, les bruits de poursuite derrière lui s’étaient évanouis.

- Oh le con ! jura l’un des trafiquants.

Intrigué, il réussit tout de même à se relever pour voir ce qu’il se passait. Les dealers s’étaient arrêtés à une distance raisonnable de la clôture. Ils semblaient avoir peur d’approcher plus près.

- Quoi que tu fasses tu vas mourir gamin ! lança brutalement un autre.

- Personne ne sort de cette maison vivant. Elle est hantée ! rajouta le premier.

- Au moins nous n’aurons plus à nous occuper de lui. Partons, ordonna celui qui semblait être le chef.

Ils tournèrent les talons, disparaissant rapidement, happés par les ombres de la nuit.

Pourquoi des hommes aussi brutaux et malveillants qu’eux avaient filés aussi vite devant un simple portail ? se demanda-il brièvement. Mais cela importait peu, il était en vie et en sécurité pour le moment, c’était tout ce qui comptait.

Il dut se frayer un chemin au travers des ronces et des herbes folles avant d’atteindre le pallier de la demeure, qui semblait bel et bien abandonnée. Le lierre avait pris possession de la pierre, grimpant jusqu’aux fenêtres du 1er étage, l’une était fracturée et le volet de la deuxième n’était plus retenu que par un seul gond menaçant de se rompre à tout moment. Le toit était quant à lui privé de ses tuiles en plusieurs endroits, et le rez-de-chaussée n’était pas non plus épargné par ce triste délabrement.

La porte d’entrée s’ouvrit dans un grincement sinistre lorsqu’il la poussa, le verrou avait été fracturé, il pénétra donc sans mal dans un petit vestibule sombre. Lorsque ses yeux se furent habitués à la pénombre il réussit à discerner en face de lui un escalier tandis que sur sa gauche le mur était ouvert sur une salle à manger. Les quelques faibles rayons de lune qui réussissaient à traverser les fenêtres encrassées de cette pièce lui permirent de distinguer quatre chaises disposées autour d’une table en bois sans aucune fioriture. Puis il remarqua certains détails : des toiles d’araignée qui pendaient ici et là, s’accrochant au lustre et s’emmêlant dans les coins de la salle, l’épaisse couche de poussière qui recouvrait tout, et une large fissure qui défigurait l’une des cloisons.

Lorsqu’il s’avança dans cette pièce une odeur de moisi vint l’assaillir et lui arracha une grimace de dégout. Ce qui le frappa ensuite fut l’austérité des lieux, il n’aperçut aucun tableau, ni aucune décoration accrochée aux murs, et, hormis la table et les chaises, aucun autre objet n’était présent dans cet espace pour venir l’égayer un peu. La cuisine, qui se trouvait au bout de la salle à manger, était dans le même état que cette dernière, vide et endommagée.

Cette maison était, certes abandonné depuis longtemps, pensa-t-il, mais elle n’avait rien d’une maison hantée. Il ne comprenait donc toujours pas pourquoi ses poursuivants avaient ainsi fuit devant elle…

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