La Fille dans la Tour - Katherine Arden
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Titre : La Fille dans la Tour
Série : Trilogie d'une Nuit d'Hiver
Autrice : Katherine Arden
Édition : Denoël
Dépôt légal : Août 2019
Genre : Conte Russe – Fantasy
Nombre de page : 416
Quatrième de couverture :
La cour du grand-prince, à Moscou, est gangrenée par les luttes de pouvoir. Pendant ce temps, dans les campagnes, d'invisibles bandits incendient les villages, tuent les paysans et kidnappent les fillettes. Le prince Dimitri Ivanovitch n’a donc d’autre choix que de partir à leur recherche s’il ne veut pas que son peuple finisse par se rebeller. En chemin, sa troupe croise un mystérieux jeune homme chevauchant un cheval digne d’un noble seigneur. Le seul à reconnaître le garçon est un prêtre, Sacha. Et il ne peut révéler ce qu’il sait : le cavalier n’est autre que sa plus jeune sœur, qu’il a quittée il y a des années, alors qu’elle n’était encore qu’une fillette, Vassia.
Mon avis :
Il s'agit ici du deuxième tome de la « Trilogie d'une nuit d'hiver » et il est dit sur la quatrième de couverture qu'il peut se lire indépendamment du premier mais je ne le conseille vraiment pas. Ce serait perdre une part importante de la caractérisation des personnages et des enjeux de l'histoire. De plus, il n'y a pas d’ellipse qui pourrait justifier une interruption entre le premier tome et celui-ci, le récit reprend immédiatement après la fin du précédent.
Lorsque j'avais lu « L'Ours et le Rossignol » je pensais qu'il s'agissait d'un one-shot, j’étais donc assez satisfaite de la fin mais j'avais encore quelques questions en suspens, c'est pourquoi j'ai été d'autant plus contente en commençant ce deuxième tome et en me disant qu'un troisième m'attend.
Ce qui est étonnant avec ce livre c'est que les personnages sont en fait très peu décrits, et je me suis dit au début de ma lecture que ça allait être problématique pour moi qui préfère vraiment les récits avec des protagonistes bien définis et intéressants. Finalement, lorsque je me suis rappelé que ce livre a la structure d'un conte cela ne m'a plus dérangé. Dans la plupart des contes les personnages sont principalement des personnages-fonctions et ce n'est pas tant le personnage que nous suivons que ce qu'il représente, c'est ce qui rend l'histoire captivante. J'ai malgré tout réussi à m'attacher aux personnages de Vassia, jeune fille éprise de liberté dans une Rus' médiévale et patriarcale, et de Morozko, le démon du gel que les gens oublient peu à peu.
Le récit aborde justement ces deux thèmes principaux : la quête de liberté et d’émancipation, et la lutte entre les adorations païenne et chrétienne.
Vassia est une jeune fille dans un monde qui n'autorise que deux choses pour une femme : se marier et avoir des enfants ou entrer au couvent et vouer sa vie à Dieu. Dans ce deuxième tome on en apprend un peu plus sur la condition des femmes de l'aristocratie dans les grandes villes, et principalement à Moscou où elles sont cloîtrées dans des tours complètement isolées du monde extérieur, n'en sortant que voilées et uniquement pour se rendre aux grands événements religieux. Ce qui ne convient pas à un esprit libre tel que Vassia. On va donc la suivre se démener contre sa condition féminine, allant même jusqu'à se travestir pour essayer d'exister. De plus, Vassia est traitée de sorcière car elle peut voir les Tchiorti, les Diables – c'est ainsi que sont nommés les divers esprits du folklore russe – alors que le christianisme orthodoxe se répand dans tout le pays. Nous assistons donc, à travers les yeux de Vassia, au déclin des créatures peuplant les traditions païennes, faute de gens pour les prier et leur rendre hommage. Il y a par exemple les Domovoïs, les gardiens de la maison, qui sont extrêmement touchants. Mais il y a surtout Morozko, la personnification de l'hiver ; froid et rude, et malgré ce statut, ce personnage est attachant et attendrissant, réussissant même à évoluer alors que son concept ne le permet normalement pas, c'est ce qui rend son histoire si intéressante.
Il y a quatre parties dans ce livre qui rythme bien l'histoire ; la première introduit le frère de Vassia, on suit ce qu'il fait de son point de vue. La seconde raconte ce que Vassia à fait en parallèle. La troisième est la réunification de la famille. Et tout s’accélère dans la quatrième, donnant ainsi l'envie de continuer la lecture immédiatement avec le troisième tome.
L'ambiance, avec ses descriptions immersives, participe également grandement à la réussite de ce livre. En le lisant on se croirait vraiment plongé dans le froid des grandes plaines enneigées. L’écriture parvient à avoir un côté poétique tout en restant accessible.
Il y a peut-être des approximations et des anachronisme dans ce qui est raconté qui pourraient rebuter les spécialistes de la période de la Moscovie médiévale mais pour une néophyte comme moi cela se lit bien.
Pour conclure, je vous conseille de lire ce livre en hiver pour coller à l’atmosphère glacée qu'il dégage, ou alors de le lire en été afin de vous rafraîchir !