Les Héritiers - 6
A l’heure du déjeuné Wanuy atterrit en douceur près de la tour, là où le Vieux les attendait. Il demanda à la jeune fille comment c’était passé cette première leçon lorsqu’elle mit pied à terre.
- Heu… Très bien, un peu renversant, mais très bien, répondit l’intéressé en se retenant à sa dragonne pour ne pas tomber car ses jambes flageolaient.
- J’étais comme toi lors de mon premier vol, affirma le vieillard en souriant, puis son regard se perdit dans le vague. Il continua néanmoins, je me rappelle de ce moment comme si c’était hier, pourtant cela fait déjà bien longtemps… Ça ne me rajeuni pas tout ça ! Bon allez manger un peu et reposez vous, enfin surtout toi Adélaïde, car cet après-midi tu recevras ton entrainement au maniement de l’épée. Tu viendras me rejoindre ici, à tout à l’heure. Le Vieux s’éloigna alors en direction de la forêt.
- D’accord, à tout à l’heure, dit Adélaïde avant qu’il ne se soit trop loin.
« - Tu viens Adélaïde, on remonte dans la tour. »
« - Je pense que je vais emprunter les escaliers… Si tu n’y vois pas d’inconvénient ! »
« - Comme tu veux, mais alors la première en haut a gagné ! »
« - Eh ! Ce n’est pas juste, tu as moins de chemin à faire que moi ! »
« - Arrête de te plaindre et cours ! » lança Wanuy qui déjà s’élevait dans les airs.
Adélaïde partit donc à toute allure, mais quand elle atteignit enfin le haut des escaliers à bout de souffle, elle vit que Wanuy était déjà allongée sur sa litière de paille.
« - En fin de compte j’aurais du monter avec toi, ça aurait été moins fatiguant. » s’exclama Adélaïde.
« - Et oui ! Allez, viens manger et te reposer comme te l’a dit le Vieux. »
« - Ah ! Justement, j’ai une question à propos du Vieux. » se rappela la jeune fille tout en s’asseyant à côté de sa dragonne.
« - Vas-y, pose. »
« - Pourquoi personne ne l’appelle par son prénom ? »
« - On raconte que quand il perdit son dragon au milieu d’une bataille, il en devint fou à en perdre la raison. Dans sa rage il en oublia son prénom et personne ne put le lui rappeler, alors depuis ce temps il se contente des noms dont les autres l’affublent. »
« - Oh, c’est pour ça… Ça doit vraiment être horrible de perdre son dragon… »
« - Comme pour un dragon s’il perd son Héritier. »
Apres cette discussion, Adélaïde et Wanuy mangèrent, puis la jeune fille s’assoupit sous l’aile de sa dragonne jusqu'à ce qu’Augustin la réveille. Comme convenu elle descendit donc rejoindre le Vieux pour qu’il lui apprenne les premiers rudiments de l’épée.
- Bien te voila, alors prend ton épée et prépare toi, s’écria le Vieux.
Adélaïde s’entraina ainsi jusqu’à la tombée de la nuit. Elle suait à grosse gouttes et était percluse de courbatures et de douleurs.
« - Je t’ai regardée cet après-midi, tu te débrouille pas si mal pour une débutante. » dit Wanuy à son Héritière quand celle-ci rentra et s’affala dans le tas de paille.
« - Il le faut bien. Je crois que sinon je risque de mourir très vite n’est-ce pas ? Et je ne veux pas mourir. »
Adélaïde avait déjà passé deux semaines dans la tour, partageant son temps entre entrainement à l’épée, et cours de vol. Elle s’initiait également au tir à l’arc, pratique pour garder ses ennemis à distance mais surtout pour s’assurer un bon festin le soir venu, comme aimait à le dire le Vieux. La jeune fille écoutait et retenait tout ce qu’il lui enseignait car elle avait bien compris que sa survie était en jeu et que son rang de Dernière Héritière du Savoir des Dragons ne lui permettait plus d’avoir le choix de son destin.
« - Allez viens, dépêche-toi ! »
« - Attends, je me prépare. »
« - Mais il ne faut pas cent ans pour prendre un arc et une épée ! »
« - Et une cape, d’ailleurs où est-elle ? »
« - Ici. »
« - Ah merci. Qu’est ce que je ferrais sans toi ? »
« - Des fois je me le demande. Bon, tu es prête ? »
« - Oui, oui, voilà. »
« - Ce n’est pas trop tôt… Allez, en selle. »
La lune brillait encore dans le ciel couleur d’encre quand Adélaïde et Wanuy quittèrent la tour en direction de la forêt. Après un petit quart d’heure de vol la dragonne atterrit dans une clairière, la lumière des étoiles et de l’astre nocturne miroitaient dans le ruisseau qui s’écoulait en son centre.
« - C’est magnifique. » s’exclama Adélaïde, bouche bée.
« - Je te l’avais bien dit. Mais attendons, l’aube est encore plus belle. »