Les Héritiers - 16
La première chose qu’Adélaïde sentit à son réveil fut la caresse rêche de la paille sur laquelle elle était couchée. Elle crut d’abord qu’elle était de nouveau en sécurité dans la tour du Vieux, mais dès qu’elle ouvrit les yeux elle s’aperçut qu’elle se trompait. Le plafond semblait taillé à même la roche. Adélaïde se releva alors sur les coudes pour regarder tout autour d’elle. La pièce était plongée dans une semi obscurité, seul un gros chandelier placé dans un coin éclairait la salle, c’était d’ailleurs l’unique objet qui égayait la pièce. Nulle trace de Wanuy. La jeune fille sentit une bouffée de panique l’envahir. Où était-elle ? Que faisait Wanuy ? Pourquoi n’était elle pas à ses côtés à attendre son réveil ? L’adolescente s’apprêtait à appeler mentalement sa dragonne quand la porte, qu’Adelaïde n’avait pas encore remarquée à cause de la faible lumière, s’ouvrit en grand, laissant passer un dragon argenté.
« - Ah, tu es réveillée. Comment te sens-tu ? »
Adélaïde n’en crut pas ses yeux, un autre dragon se tenait devant elle !
« - Tu n’as jamais vu de dragons de ta vie ? » demanda ce dernier, intrigué par le regard de la jeune fille.
« - Où est Wanuy ? » demanda immédiatement l’adolescente sans répondre directement à la question précédente.
« - Je suis là Adélaïde, jamais je ne te quitterais ! » s’exclama la voix familière de la dragonne noire.
Elle venait d’apparaitre dans l’encadrement de la porte et quand Adélaïde l’aperçut elle voulut se lever et courir vers sa dragonne mais la douleur dans sa jambe la tiraillait toujours, ce qui la força à se rassoir.
« - Tu ne dois pas bouger pendant au moins une journée si tu veux que ta blessure cicatrise bien. » ordonna le dragon argenté avant de s’en aller.
Une fois seule dans la pièce avec Wanuy, Adélaïde lui posa les questions qui l’avaient assailli à son réveil.
« - Wanuy, où sommes-nous ? »
« - Nous sommes là où nous devions aller ! C’est-à-dire dans le Repaire des Dragons. »
« - Dans le Repaire des Dragons ? Comment est-ce possible ? La dernière chose que je me souvienne c’est que l’on volait, après c’est le trou noir. Que s’est-il passé pendant que j’étais évanouie ? »
Wanuy entreprit de lui raconter en détail la conversation qu’elle avait eue avec les quatre gardes dragons, ce qui lui avait permis d’entrer dans la forteresse pour trouver un soigneur malgré la désapprobation et l’accueil glacial de certains.
Adélaïde demanda ensuite à sa dragonne si elle avait réussi à obtenir une audience auprès du Roi, malheureusement la réponse fut négative. Après son récit, les deux Héritières, fatiguées par leur long périple, s’endormirent blotties l’une contre l’autre dans la paille chaude.
Ce qui réveilla Adélaïde le lendemain fût la douce odeur de la viande grillée posée en face de leur lit de paille. Mais la jeune fille remarqua que sa dragonne dormait toujours, ce qui l’étonna.
« - Wanuy ? » appela doucement l’adolescente en remuant un peu l’aile noire qui l’enlaçait.
La dragonne, dans un demi-sommeil, maugréa quelques paroles incompréhensibles.
« - Le déjeuner est servi et ton aile me gêne pour aller manger ! » s’exclama Adelaïde.
« - C’est pour manger ? Tu aurais dû le dire plus tôt ! » s’écria Wanuy, tout à fait réveillée à présent, en se jetant sur la nourriture.
« - Je vois que l’appel du ventre est plus fort que tout ! »
Peu après que le repas fût englouti par les deux Héritières, Adélaïde reprit d’un ton calme :
« Ça m’a fait du bien de dormir au chaud et au sec et d’avoir un bon repas. Mais on ne doit oublier pourquoi on est ici. »
« - Tu devrais encore te reposer un peu, ta blessure n’est pas totalement cicatrisée. » s’inquiéta la dragonne noire.
« - Nous n’avons pas le temps d’attendre, une guerre se prépare ! »
« - D’accord, allons trouver le Roi. » déclara Wanuy en se dirigeant vers la porte.
Adélaïde se leva en réprimant une grimace de douleur lorsqu’elle sollicita sa jambe blessée, mais bien qu’elle boitillait, elle réussi à se rendre jusqu'à l’entrée sans trop de difficulté.
« - Il n’y a pas de poignée sur la porte, observa la jeune fille, ils nous ont enfermées ? Comment allons-nous sortir ? »
Pour toute réponse Wanuy posa son museau sur une plaque de métal encastrée dans la porte, et comme par magie celle-ci s’ouvrit.
« - Les dragons ont du mal à utiliser des poignées comme les humains, alors ils ont inventés un autre moyen pour ouvrir les portes. » expliqua la dragonne une fois qu’elle fût sorti de la pièce.
Adélaïde et Wanuy se trouvaient maintenant dans une grande salle, il y avait des portes sur chaque mur. L’une d’elle s’ouvrit et laissa apercevoir le dragon d’argent qui avait soigné Adélaïde, ce fut Wanuy qui parla la première.