Les Héritiers - 21

Publié le par Arkeane

"Elle sentit l’onde de chaleur qui se dégagea de ces trente dragons crachant des torrents de flammes."

La dragonne bouscula gentiment Adélaïde du museau, celle-ci eu un faible sourire et lui gratouilla le haut du crane. Pendant un instant Wanuy savoura la caresse en grondant de plaisir puis elle se releva et reprit plus sérieusement :

« - Nous sommes les deux dernières Héritières du Savoir des Dragons, nous avons été liées bien avant notre naissance pour le bien de l’humanité, il ne faut pas faiblir ! Nous n’avons pas le droit de faiblir pour tous ceux qui nous soutiennent et nous suivent ! Pour tous ces villageois qui vont risquer leur vie avec nous ! Battons-nous et montrons à ces Guerriers des Flammes de quoi nous sommes capables ! »

Le regard d’Adélaïde se fit soudain déterminé et elle hocha la tête.

« - Allons affronter notre destin ! »

Les Guerriers approchaient, bien en rang, d’un pas lourd. Ils étaient encore trop loin pour que l’on puisse discerner sur leurs visages les sourires sadiques et les yeux qui pétillaient d’envie de sang et de violence. Mais déjà l’aura de malveillance et de cruauté qui les accompagnait frappa les troupes alliés qui sentirent soudain tous leurs espoirs s’envoler.

- Ne reculez pas ! Tenez la ligne ! Ne montrez pas votre peur, ils s’en délectent ! s’époumona le Vieux. Nous ne les laisserons pas nous vaincre aussi facilement !

Cette voix puissante malgré l’âge, à qui le commandement allait si bien, eu pour effet de raffermir un peu le courage des paysans qui se repositionnèrent.

L’attente était insoutenable, aussi bien pour les soldats d’un jour que pour ceux qui portaient les armes depuis plus longtemps. Même Wanuy et quelques uns des jeunes dragons qui s’étaient joint à la compagnie piaffaient d’impatience.

Adélaïde, elle, fixait la marrée noire qui avançait lentement, trop lentement… Elle prit alors conscience que tout était prémédité chez les Guerriers des Flammes pour laisser la peur s’insinuer et s’épanouir jusqu'à enserrer le cœur de leurs ennemis et les pétrifier, ils n’avaient alors plus qu’à les faucher dans un grand rire infernal…

Cependant, un ordre fut donné rompant enfin l’interminable attente et le désespoir mêlé de terreur d’Adelaïde.

- Seigneur Araxior, à vous !

Un grondement sourd, reprit en cœur par tous les autres dragons, s’éleva dans la plaine. La force de leurs rugissements fit trembler les habitations de Saint-Baron, et malgré qu’ils aient été avertis, certains fermiers tremblèrent de peur et s’évanouirent. Il ne fallait cependant pas s’attendre à ce que les Guerriers des Flammes abandonnent leurs armes et détalent à la première manifestation de puissance chez les opposants. Ils en avaient déjà combattu des dragons et même tués des centaines… Mais c’eut tout de même l’effet escompté, les Guerriers des Flammes se figèrent un bref instant. Ils avaient été surpris que des dragons soient présents sur le champ de bataille, néanmoins ils se remirent en marche très rapidement.

Adélaïde songea distraitement qu’elle n’avait pas eu le temps de parler avec le Vieux de ce qui lui était arrivé depuis leur départ. Si elle ne réussissait pas à mettre en application le peu qu’elle avait appris du maniement d’une arme, elle n’aurait alors plus jamais l’occasion de discuter tranquillement avec lui autour d’une tasse de thé fumante dans son bureau...

« - Oh non ! Ne pense surtout pas à ça juste avant la bataille, Adélaïde ! J’ai confiance en toi ! »

« - Oui, tu as raison ! »

La jeune fille se saisit donc fermement de son épée et attendit, résolu, les ordres qui ne tardèrent pas.

« - Dragons, en avant! » ordonna le Roi Araxior.

Et c’est ainsi qu’une trentaine de Dragons, dont Wanuy chevauchée par Adélaïde, s’élevèrent dans les airs en direction des Guerriers des Flammes.

« - C’est parti ! »

En quelques battements d’ailes les dragons furent au-dessus des Guerriers des Flammes mais ceux-ci n’étaient pas restés les bras croisés à les attendre patiemment. Dès qu’ils comprirent que des dragons venaient gonfler les rangs de leurs proies, ils s’étaient arrêtés et certains d’entre eux étaient en train d’assembler des poutres de métal. Cela n’eu aucune importance pour les dragons car ils venaient de recevoir l’ordre de faire feu.

Adélaïde, qui ne pouvait pas faire grand-chose juchée là-haut sur Wanuy, se contenta de regarder la scène. Elle sentit l’onde de chaleur qui se dégagea de ces trente dragons crachant des torrents de flammes, et elle en entendit le crépitement tout autour d’elle. Mais par-dessus tout, elle crut discerner dans le tumulte du vent et des battements d’ailes, les hurlements d’atroces douleurs des Guerriers se faisant bruler vif. Ce spectacle lui donna la nausée, elle qui n’avait connu que la béatitude d’une vie de jeune paysanne. Certes, le quotidien était dur et éreintant mais l’amour y était omniprésent au moins… Pourtant, ce qu’elle vu après fut bien pire que ce qu’elle avait imaginé. Non pas des corps carbonisés et méconnaissables comme elle s’y attendait, mais des corps bien vivant qui continuaient à mettre en place leur engin de métal.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article